Kike Ojo, de l’AOSAE, donne une mise à jour sur l’évolution du projet Une vision une voix.
Au cours de l’automne et de l’hiver, le projet Une vision une voix a tenu 15 consultations communautaires aux quatre coins de la province. Quel était l’objectif de ces consultations?
La cueillette de commentaires de la communauté nous aidera à atteindre le but du projet Une vision une voix, qui est d’élaborer un guide détaillé à l’intention du personnel du bien-être de l’enfance sur la façon d’améliorer les résultats pour les familles et les enfants afro-canadiens qui reçoivent des services de bien‑être de l’enfance. Pour obtenir ces commentaires, nous nous sommes promenés de Windsor à Ottawa, en passant par Sudbury, et nous avons tenu 15 séances en tout. Nous avons aussi tenu des séances de travail axées sur les jeunes, et une autre avec la communauté LGBTQ. Nous préparons le terrain en vue d’élaborer des pratiques du bien-être de l’enfance qui serviront le mieux la communauté noire.
Qu’avez-vous retiré le plus de ces consultations communautaires?
Ma participation à toutes ces séances m’a permis de constater que les enjeux touchant les Afro‑Canadiens sont les mêmes dans toute la province. La constatation de ces points communs a eu un très grand impact.
Avez-vous des exemples de ces points communs?
Un point commun qui m’a vraiment frappé est ce sentiment que les membres de la communauté afro‑canadienne ne savent pas vraiment ce que font les SAE. C’est aussi un sentiment généralisé dans l’ensemble de la communauté. Cette réalité a une incidence particulière sur la communauté afro‑canadienne, lorsque vous ajoutez à cela les expériences que vivent les personnes noires avec les systèmes d’autorité comme le bien-être de l’enfance, l’immigration et la police. La communauté afro‑canadienne a le sentiment qu’on profite d’elle parce qu’elle ne connaît pas ses droits. Et si les gens ne connaissent pas leurs droits, ils ne peuvent pas les faire valoir.
Un autre thème des consultations est que le racisme auquel font face les Afro-Canadiens dans le système du bien-être de l’enfance n’est que l’une des nombreuses formes de racisme systémique, et que ces formes de racisme systémique se recoupent. Les Afro-Canadiens vivent ce chevauchement des systèmes racistes de la même manière partout dans la province. Chaque personne présente aux consultations a parlé de surveillance, non seulement de la part du bien-être de l’enfance, mais aussi des écoles et de la police. L’un des exemples les plus évidents est que les interprétations extrêmes viennent des jeunes. Quelque chose d’aussi simple que de dire « Ma mère va me tuer si je n’obtiens pas de bonnes notes à l’école. » peut effectivement engendrer une enquête de la SAE lorsque la famille est Noire.
Quel moment vous a été le plus mémorable?
Plus de 70 personnes ont participé à la consultation de la région de Peel. Nous nous sentions comme en famille, même si les gens ne se connaissaient pas. Les membres de la communauté ont pris le micro et ont partagé les histoires les plus personnelles que nous ayons entendues. J’ai été estomaquée de voir à quel point les gens voulaient partager leurs histoires. Nous ne leur avons pas demandé; ils l’ont juste fait. C’était probablement la première fois que quelqu’un leur demandait de raconter leurs expériences, et ils n’en finissaient plus de les raconter. Nous nous encouragions et nous nous appuyions les uns les autres. C’était fantastique!
Quelles sont les prochaines étapes du projet Une vision une voix?
Après avoir tenu 15 consultations communautaires, nous commençons à préparer le terrain pour l’élaboration d’un guide à l’intention du personnel du bien-être de l’enfance, sur la façon de mieux servir la communauté afro-canadienne de l’Ontario. Il reste deux étapes importantes à franchir avant la réalisation de ce guide : nous voulons d’abord rencontrer la communauté à nouveau en mai 2016, dans les huit villes où nous avions prévu de tenir des consultations au départ. Nous faisons cela pour boucler la boucle : nous avons rencontré la communauté noire et nous leur avons posé des questions. Maintenant, nous allons partager nos constatations provinciales et chercherons à obtenir leur approbation pour élaborer la version finale du guide.
Et en juin, nous envisageons de faire quelque chose de semblable à un symposium à l’intention des SAE et de leurs partenaires communautaires, afin d’avoir les commentaires du secteur du bien-être de l’enfance. Nous leur transmettrons les commentaires de la communauté noire, et nous tenterons aussi de comprendre les difficultés des membres du personnel du bien-être de l’enfance, les failles qu’ils ont repérées, et ce dont ils estiment avoir besoin pour offrir les meilleurs services. Personne ne leur a encore demandé cela non plus. Nous prévoyons que la version finale du guide sera prête vers la fin de 2016. Restez à l’écoute, parce que nous aurons plus d’information à vous donner.
Je suis aussi toujours en communication avec les médias et la communauté pour maintenir le dialogue et encourager les gens à continuer de nous partager leurs histoires. Les gens posent encore des questions, et nous en sommes heureux; nous acceptons aussi chaque invitation que nous recevons.