Taïna Mayberry, coordonnatrice des Programmes pour les jeunes, AOSAE
Imaginez les sentiments d’inutilité et de culpabilité qui occupent votre esprit comme un invité non désiré. Ils persistent de façon apathique, prenant l’espace jadis occupé par la confiance en soi, les intérêts et la vie sociale. Vous voulez de l’aide. Mais où commencer et qui vous écoutera?
Maintenant, imaginez éprouver ces sentiments à l’âge de 15 ans.
Le Centre for Addiction and Mental Health (CAMH) estime que les jeunes âgés de 15 à 24 ans sont plus susceptibles d’avoir des troubles de santé mentale ou de toxicomanie que tout autre groupe d’âge. Malgré tout, seulement un jeune sur cinq ayant des problèmes de santé mentale accédera aux traitements appropriés.
En tant que coordonnatrice des Programmes pour les jeunes à l’Association ontarienne des sociétés de l’aide à l’enfance, de telles données me font comprendre la raison d’être de mon travail, qui inclut les soutiens en santé mentale à l’intention des jeunes pris en charge et des jeunes ayant déjà été pris en charge.
Selon Santé mentale pour enfants Ontario (SMEO), les nombres de visites des enfants et des jeunes au service des urgences et aux hôpitaux en raison de troubles mentaux ont augmenté respectivement de 54 % et 60 % au cours de la dernière décennie, alors que 63 % des jeunes déclarent que la stigmatisation est la raison la plus probable de ne pas rechercher de l’aide.
Parallèlement, les enfants et les jeunes dans le système du bien-être de l’enfance peuvent être aux prises avec des troubles mentaux uniques liés à des mauvais traitements et des traumatismes, des troubles de l’attachement et du stress post‑traumatique par suite de leurs expériences vécues.
Il existe aussi de nombreuses différences et nuances chez les jeunes ayant des identités marginalisées croisées parce qu’ils ont des défis uniques liés à l’iniquité. SMEO mentionne que :
- Les jeunes noirs sont considérablement sous-représentés dans les services de santé mentale et de traitement et surreprésentés dans les établissements de confinement.
- Le nombre de jeunes des Premières nations qui décèdent par suicide est de 5 à 6 fois plus élevé que celui des jeunes non autochtones.
- Les jeunes LGBTQ ont un risque de toxicomanie d’environ 14 fois plus élevé que leurs pairs hétérosexuels.
- Les jeunes vivant dans des quartiers à faible revenu avaient les plus hauts taux de suicide, de visites au service des urgences en raison d’automutilation, d’utilisation des services de soins psychiatriques aigus et de cas de schizophrénie traitée.
Mais il y a de l’espoir.
La campagne Kids Can’t Wait de SMEO met l’accent sur le besoin de réduire les temps d’attente pour les services de santé mentale à l’intention des enfants et des jeunes. SMEO énonce que chaque année, 120 000 familles comptent sur les services à l’enfance et de santé mentale communautaires, mais que beaucoup plus d’enfants et de familles ne peuvent pas accéder à ces services en partie à cause des temps d’attente. En l’absence de soins communautaires adéquats, les enfants et les jeunes recherchent souvent des traitements dans les hôpitaux – et obtiennent simplement leur congé sans recevoir le soutien continu dont ils ont besoin chez eux dans leur communauté. Dans les pires cas, les enfants ne reçoivent jamais les soins dont ils ont besoin.
Kids Can’t Wait met l’accent sur la rédaction d’une lettre à la première ministre Kathleen Wynne, lui demandant de remédier à cette situation en augmentant de 120 millions $ par année le financement des programmes de santé mentale communautaires, afin de nous assurer qu’aucun enfant ou jeune n’attende plus de 30 jours pour recevoir des traitements en santé mentale.
Si vous souhaitez produire un changement positif aujourd’hui, envisagez d’ajouter votre nom à la lettre à la première ministre Wynn : kidsmentalhealthcantwait.ca
Taïna Mayberry est la coordonnatrice des Programmes pour les jeunes à l’Association ontarienne des sociétés de l’aide à l’enfance. Taïna est une travailleuse sociale agréée (maîtrise en travail social) ayant de l’expérience en engagement des jeunes et coordination de programmes pour les jeunes, facilitation d’ateliers de psychoéducation et interventions cliniques. Elle a recours à des pratiques antioppressives, fondées sur les forces et équitables dans l’ensemble de son travail. Dans ses temps libres, Taïna aime passer du temps avec son chat, lire, faire du saut au trampoline et voyager.