Pouvez-vous nous parler un peu de vous et de la façon dont vous êtes arrivée dans le secteur du bien-être de l’enfance?
Comme tout le monde, j’ai plusieurs facettes de mon identité qui déterminent qui je suis et la perspective que j’apporte dans mon travail du bien-être de l’enfance. Je suis originaire d’Inde, mais en fait, je suis née sur une petite île du Moyen-Orient appelée Bahreïn. J’ai déménagé au Canada quand j’étais adolescent et je suis maintenant une fière citoyenne canadienne. Je suis aussi mère, travailleuse sociale, chargée de cours à l’université, ainsi que consultante et formatrice en matière d’équité et d’inclusion. Donc, le fait d’être une femme racialisée, immigrante et allosexuelle avec des handicaps invisibles a influencé mon approche intersectionnelle du bien-être de l’enfance et ma passion pour ce travail. J’ai commencé à travailler dans le domaine du bien-être de l’enfance après avoir terminé mon baccalauréat en travail social. Je pensais rester seulement deux ans, puis passer à autre chose. Mais aujourd’hui, 20 ans plus tard, je suis toujours là. Je continue d’aimer ce domaine, parce que je côtoie des enfants, des jeunes et des familles chaque jour, alors qu’ils font face aux plus grands défis et obstacles de leur vie.
Qu’est-ce que la « transformation de la pratique »?
La transformation de la pratique consiste ultimement à obtenir de meilleurs résultats pour les enfants, les jeunes et les familles avec lesquels nous travaillons dans tout l’Ontario. Il s’agit de mettre l’accent sur la vérité et la réconciliation, ainsi que d’intégrer des pratiques fondées sur les traumatismes dans une optique d’équité intersectionnelle dans tout ce que nous faisons. Je me rends compte que c’est un jargon très complexe. Donc, en d’autres termes, il s’agit de nous assurer que notre travail et nos services du bien-être de l’enfance sont ancrés dans l’équité, ainsi que de veiller à ce que chaque enfant et jeune ait les mêmes chances de s’épanouir, quelles que soient son identité, son origine ou sa situation.
Pourquoi la pratique du bien-être de l’enfance doit-elle se transformer?
Les pratiques du bien-être de l’enfance sont fondées sur des cadres coloniaux, ce qui a entraîné un nombre disproportionné d’enfants et de jeunes autochtones et noirs dans le système du bien-être de l’enfance. Bien que de bons efforts soient déployés dans toute la province pour modifier les pratiques existantes, nous devons continuer à nous assurer que toutes les familles ont accès à des services et des soutiens équitables, peu importe où elles vivent. Nous travaillons avec les familles les plus marginalisées de notre société : des familles qui font face à de nombreux obstacles à l’accès aux services et aux soutiens, sur les plans individuel, organisationnel et systémique. Donc, l’idée est que grâce à la transformation, toutes les familles de l’Ontario recevront le plus haut niveau de services qui tiennent compte de leur identité, leur culture et leurs coutumes, et sont fondés sur les traumatismes et les preuves.
Qu’est-ce qui vous inspire à accomplir ce travail?
Les enfants et les jeunes que je sers m’inspirent chaque jour pour accomplir ce travail. Au cours de mon séjour dans le secteur, j’ai rencontré tant d’enfants et de jeunes forts, doués, résilients et aimants qui ont surmonté d’innombrables obstacles dans leur jeune vie – tous échappant à leur contrôle. Ces jeunes ont courageusement partagé ce que c’est que de travailler avec nous et comment nous pouvons nous améliorer. Ils sont donc la raison pour laquelle je fais ce que je fais. Pour améliorer les choses pour eux. Là où j’ai grandi, nous n’avions pas de système du bien-être de l’enfance. Et cela m’a montré qu’il y a un besoin pour notre travail, mais aussi qu’il doit être accompli de manière à ne pas coloniser davantage les gens et à ne pas nuire à leur identité. Je suis honorée de jouer un rôle dans la poursuite de ces objectifs dans le secteur du bien-être de l’enfance en Ontario.
Quels sont les plus grands défis auxquels fait face le secteur du bien-être de l’enfance dans ce travail? Comment pourrions-nous les relever?
À mon humble avis, les plus grands défis que doit relever le secteur du bien-être de l’enfance sont ceux de l’espoir et de l’optimisme. Nous devons être les porteurs d’espoir pour nous-mêmes ainsi que pour les enfants et les jeunes que nous servons. Parce que sans espoir de quelque chose de mieux, nous resterons bloqués dans nos façons habituelles d’accomplir le travail. C’est-à-dire, les méthodes coloniales. Afin de nous transformer, nous devons passer d’une mentalité saturée de problèmes à une mentalité de possibilités. Nous devons être courageux et prêts à prendre les mesures audacieuses nécessaires pour changer nos pratiques et nos services pour les enfants, les jeunes et les familles de notre province. Avec de l’espoir, de la bravoure et de l’innovation, je crois que tout est possible.